La mort de ma mère ne fut pas un événément, mais un processus; une longue et inssupportable agonie. Elle n’a pas joui d’une ‘mort douce’, mais une mort lente et cruelle. Nous etions à son chevet, lui tennant la main, lui parlant, lui epargnant la souffrance la plus cruelle: la solitude, l’abandon. Et tout au long de ce voyage vers l’infinie ma mère nous confiait son désir de partir doucement: glisser dans un someil profond, sans retour. Son souhait n’a pas été exaucé.
Elle suppliait aux medecins et aux infirmières de lui aider mettre fin à sa souffrance. Entretemps, son cœur continuait tant bien que mal son travail de vaine résistance et son pouls battait pour irriguer ce qui restait accessible de son corps qui n’en pouvait plus.
Maintenant, hormis la tristesse et la nostalgie de l'avoir perdue, je suis heureux d'avoir eu la force de l'accompagner ainsi et d'avoir pu faire face sans lâcheté. Parce qu’au cours de ce voyage cauchemaresque elle a suffert terriblement, pour la plûpart en silence. Et cela allait de mal en pis.
Vers la fin, elle a dû se resigner à un de ses craints: la dépéndence sur autri pour assurer son hygiène personnel. Nul ne peut imagine la honte, l’humiliation, l’empleur de l’horreur qu’elle a dû epreuver.
S’il y a une petite consolation à laquelle je me cramponne, c’est le fait que le pire de ses peurs, celle qu’elle redoutait plus que tout ne s’est pas réalisé: elle a gardé ses facultés mentales indemnes et sa clarité d’ésprit intact. Même lorsque ses dernières heures furent proches, elle arrivait à s’exprimer d’une manière stupifiante.
La mort lui tennant la main, elle nous a dit qu’elle veut y aller; qu’ elle a fait la paix interieure. Et nous l’avons regardé, médusés. Parmi les images qui me resteront des derniers jours de ma mère, il en est une, très belle, presque indicible tant elle se révèle riche de sens. C’est l’image de la main droite, diaphane et émaciée qui prend un peigne pour se brosser les cheveux. C'était ce qu'il lui restait de sa pudeur, sa modestie, sa vie de femme. Peut être n’y a-t-il pas de morts heureuses, mais la sienne fut une mort triste; prolongée sans but ni raison par simple lâcheté de al part du corps médical; les aides-soignantes, les infirmières, le medicins.
La loi n’est pas encore arrivé à définir ce qui constitue ‘une qualité de vie’, et en consequence, ne le milieu hospitalier ne peut pas porter succours aux personnes qui jugent leur vie depourvu de qualité. Son visage fut contorté; ses yeux creux, sa physique squellette. Elle était méconnaisable. Ma mère. Qui croirait que ce corps, rangé par un cancer virulent, sans pitié, m’a porté au monde?
La voir entamer son dernier voyage, être temoin de ses heures finales sur notre planète bleue fut un privilège et un act de pardon. Le passé s’est effacé d’un seul coup. Ce qui comptait était le present; le futur n’ayant plus ni rôle, ni place. J’ai senti une transformation; la paix était venu. Ma mère a fait la paix. Je la vois encore, respirant tranquillement, la bouche grande ouverte. Je vois la morphine fait son œuvre et, finalement, la plonge dans un sommeil profond où la douleur disparaît en même temps que sa conscience. Cette femme, plongée dans son coma morphinique, c’est ma mère.
No comments:
Post a Comment